Le sursis comme outil d’individualisation de la peine

Le sursis comme outil d'individualisation de la peine

Pour éviter le placement en détention, considérée comme une des causes de la récidive, la loi Bérenger du 26 mars 1891 instaure le sursis à l’exécution de la peine en cas de première condamnation à de l’emprisonnement.
Parfois difficilement comprise des justiciables du fait de son apparente complexité, la peine de sursis est une peine prononcée par une juridiction de jugement, dont l’exécution est suspendue.
Autrement dit, un magistrat décide d’une peine que le condamné n’exécutera pas et ce, sous certaines conditions.
Par la suite, la loi du 23 décembre 1958 est venue compléter l’arsenal juridique en instituant le sursis avec mise à l’épreuve afin de combiner sanction et accompagnement.
Aujourd’hui, le sursis simple cohabite avec le sursis probatoire (anciennement SME) et permet aux juridictions pénales de prononcer des peines alternatives à l’emprisonnement lorsque les faits commis et la personnalité de l’auteur le permettent.
Bien qu’il puisse sembler complexe à appréhender, le sursis — qu’il soit simple ou probatoire — constitue un véritable outil d’individualisation de la peine, permettant d’assurer une justice plus adaptée et proportionnée.

Quelle est la différence entre le sursis simple et le sursis probatoire ?

Le sursis simple consiste à suspendre une peine d’emprisonnement pendant une durée de cinq ans.

Durant ces cinq années dites « d’épreuve », le condamné ne doit pas commettre de nouvelle infraction, faute de quoi il s’expose à la révocation de son sursis.
Il s’agit là de la seule obligation qui lui incombe.

Le sursis probatoire, en revanche, associe la suspension de la peine d’emprisonnement à des obligations et interdictions imposées au condamné.
Ces obligations peuvent être variées : suivre un traitement médical, exercer une activité professionnelle, suivre une formation, indemniser la victime, etc.
Des interdictions peuvent également être fixées, telles que ne pas entrer en contact avec certaines personnes (victimes, co-auteurs) ou ne pas se rendre dans certains lieux.

Durant la période de probation, le procureur de la République ou le condamné peuvent demander
la modification des obligations imposées.
Le juge de l’application des peines (JAP) organise alors un débat contradictoire, en présence du procureur, du condamné et de son avocat, avant de statuer.
Parce qu’il est plus contraignant que le sursis simple, la période d’épreuve du sursis probatoire (appelée ici « période de probation ») est en principe plus courte.
Celle-ci ne peut en effet pas dépasser trois années, étant précisé qu’en cas de récidive ce délai peut être porté à cinq ans, lui-même poussé à sept ans en cas de nouvel état de récidive.

En répression de quelles infractions le sursis peut-il être prononcé ?

Le sursis simple ne peut être appliqué qu’à une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à 5 ans.
Ainsi, une personne condamnée à 6 ans de prison ne pourra pas bénéficier de ce dispositif.

En outre, il est possible que la juridiction n’assortisse que partiellement la peine d’emprisonnement d’un sursis simple.
A titre d’exemple, une personne peut se voir condamner à une peine de 18 mois d’emprisonnement, dont un an assorti d’un sursis simple.

L’excédent de 6 mois demeurera donc une peine d’emprisonnement ferme, aménageable sous certaines conditions.

En matière criminelle et correctionnelle, seule une personne n’ayant pas été condamnée au cours des 5 dernières années précédant les faits à une peine d’emprisonnement (et non à compter de la date de l’audience, souvent bien tardive) pour un crime ou un délit de droit commun peut bénéficier du sursis simple.
Ainsi, une personne ayant été condamnée en 2022 pour des faits de violences ne pourra pas prétendre au bénéfice d’une peine de simple pour des faits commis en 2025.

Le sursis probatoire ne peut concerner que les condamnations à un emprisonnement de 5 ans au plus, ou 10 ans au plus en cas de récidive légale.

Comment se déroule l’exécution du sursis probatoire ?

Le condamné est placé sous le contrôle du Juge de l’Application des Peines (JAP) qui veille à ce que les obligations et interdictions auxquelles il est soumis soient respectées.
En pratique, le condamné est en lien avec les conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation (CPIP) à qui est délégué le contrôle.
Le condamné doit en outre répondre aux convocations du juge ou du travailleur social et se soumettre aux vérifications nécessaires à l’évaluation de son comportement et de sa réinsertion.

Que se passe-t-il lorsque le sursis est respecté ?

En l’absence de nouvelle infraction pendant le délai d’épreuve, la peine d’emprisonnement est considérée comme n’ayant jamais existé.
Cela vaut même lorsque le sursis ne concernait qu’une partie de la peine (dans le cas d’une peine mixte).
On considère ainsi la peine comme « non-avenue » : elle est effacée du bulletin n° 2 du casier judiciaire, mais reste inscrite au bulletin n° 1 (articles 132-35 et 132-51 du Code pénal).

Dans quel cas le sursis peut-il être révoqué ?

En cas de commission d’une nouvelle infraction, la juridiction saisie a alors la possibilité de révoquer la peine de sursis précédemment prononcée.
En cas de révocation d’un sursis simple, la première peine est exécutée séparément de la nouvelle condamnation : les peines ne se confondent pas.
Le Juge de l’application des peines a également cette possibilité lorsque le condamné n’a pas satisfait aux mesures de contrôle et aux obligations particulières qui lui étaient imposées.
La personne condamnée pourrait alors être amenée à effectuer la totalité – ou moins, les Juges ayant la possibilité de révoquer seulement partiellement une peine – d’emprisonnement en détention.
La privation de liberté serait dès lors effective puisque la suspension serait annulée.
Il est dès lors particulièrement important de prendre les peines d’emprisonnement assorti du sursis très au sérieux.

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