L’EXÉCUTION FORCÉE D’UNE DÉCISION

L’EXÉCUTION FORCÉE D’UNE DÉCISION

Le justiciable qui obtient une décision de justice satisfaisante peut avoir des difficultés à recouvrer les sommes qu’il a obtenues.

Il arrive en effet fréquemment que la partie succombante refuse de s’exécuter spontanémment.

La partie créancière n’est toutefois pas démunie.

Il existe des solutions pour récupérer les sommes auxquelles le débiteur a été condamné, notamment l’exécution forcée d’un jugement.

• Qu’est ce qu’une décision de justice définitive ?

En principe, un jugement civil rendu par un Tribunal peut faire l’objet d’une exécution immédiate, mais encore faut-il que la décision bénéficie du caractère exécutoire.

Pour ce faire, il convient que la décision soit portée à la connaissance des parties officiellement :

– Soit par notification du greffe, qui consiste en une simple remise matérielle de celle-ci (envoi par courrier recommandé) ;

– Soit par signification par un Commissaire de justice à la demande de la partie la plus diligente.

La notification/ signification fait courir les délais pour l’exercice des voies de recours dont la durée varie en fonction des décisions rendues :

– 1 mois (en principe) pour les jugements civils ;

– 15 jours pour les ordonnances (de référé ; de mesures provisoires en matière de divorce ; de mise en état etc).

– 10 jours en matière de redressement ou de liquidation judiciaire.

Il est à noter que le délai d’appel est augmenté d’un mois pour les décisions rendues en métropole lorsque la partie concernée résident en Outre-mer ; et inversement (articles 643 et 644 du Code de procédure civile).

Conformément à l’article 504 du Code de procédure civile, les parties peuvent également signer un acte d’acquiescement.

Les parties acceptent ainsi définivitement la décision ce qui les prive d’exercer d’éventuelles voies de recours.

Par ailleurs, il se peut que la décision ait été rendue par défaut, c’est-à-dire lorsque les conditions cumulatives de l’article 473 alinéa 1er du Code de procédure civile sont réunies, à savoir :

– Le défendeur n’a pas comparu ;

– La décision a été rendue en dernier ressort (le justiciable ne peut pas faire appel) ;

– La citation n’a pas été délivrée à personne.

Dans ce cas précis, une autre voie est ouverte au défendeur conformément à l’article 476 du Code de procédure civile; celle de l’opposition.

Concrètement, cette voie de recours permet au justiciable de contester une décision rendue en son absence et alors que la date ou l’existence même de l’audience n’avait pas été porté à sa connaissance.

C’est alors que si aucun appel n’a été interjeté ou qu’aucune opposition n’a été formée, la décision rendue devient définitive – elle acquiert ainsi la force exécutoire.

En ce qui concerne les décisions pénales, celles-ci n’ont pas à être signifiées lorsqu’elles ont été rendues « contradictoirement », c’est-à-dire en présence des parties.

En revanche, lorsque le prévenu n’a pas comparu, il est indispensable que la décision lui soit signifiée pour lui être opposable.

Le Ministère public est alors en charge de cette signification sauf lorsqu’il s’agit d’un Jugement rendu sur les seuls intérêts civils (article 707-1 du Code de procédure pénale, Cass, 2e civ, 15 Octobre 2015, pourvoi n° 14-23.370).

Tout comme en matière civile, la voie de l’opposition est ouverte à celui qui a été jugé par défaut par un Tribunal de police, un Tribunal correctionnel ou une chambre des appels correctionnels.

• Est-il possible de faire appliquer une décision non définitive ?

La question peut se poser dans le cas d’une décision de première instance et pour laquelle l’une des parties a interjeté appel dans le délai légal, celle-ci est elle applicable jusqu’à l’obtention de la nouvelle décision, par exemple,

Dans une telle hypothèse, tout va dépendre de si la décision bénéficie, ou non, de l’exécution provisoire.

Dans les décisions civiles, l’exécution provisoire est de principe (article 514 du Code de procédure civile).

Si le Juge décide de l’écarter (à la demande d’une partie ou d’office), ce dernier doit motiver sa décision.

À noter que, dans certaines matières, l’exécution provisoire ne peut jamais être écartée.

C’est le cas lorsque le Juge « statue en référé, qu’il prescrit des mesures provisoires pour le cours de l’instance, qu’il ordonne des mesures conservatoires ainsi que lorsqu’il accorde une provision au créancier en qualité de juge de la mise en état » (article 514-1 du Code de procédure civile).

En tout état de cause, il est possible de saisir par assignation le Président de la Cour d’appel si les conséquences de l’exécution provisoire risquent d’être « manifestement excessives » ou « s’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation », conformément à l’article 514-3 du Code de procédure civile (exemple : en matière de destruction).

À noter que l’exécution provisoire peut être ordonnée pour tout ou partie de la décision.

En ce qui concerne l’exécution provisoire des décisions des Tribunaux pénaux statuant en matière d’intérêts civils, celle-ci peut être ordonnée par le Juge afin que la victime puisse obtenir rapidement le versement des dommages-intérêts.

• Quels sont les moyens possibles pour faire exécuter un jugement ?

La partie succombante peut s’exécuter volontairement, c’est-à-dire qu’elle accepte de se conformer à la décision et l’exécute en parfaite bonne foi.

Il est cependant possible qu’elle s’y refuse. En cas d’opposition à l’exécution, plusieurs outils sont à la disposition de la partie créancière pour permettre de forcer la partie adverse à se conformer au jugement rendu.

En effet, conformément à l’article L.111-1 du Code des procédures civiles d’exécution : « Tout créancier peut, dans les conditions prévues par la loi, contraindre son débiteur défaillant à exécuter ses obligations à son égard ».

À noter que les mesures d’exécution forcée ont toujours pour but de recouvrer une somme d’argent.

Seul l’huissier de justice, désormais nommé Commissaire de justice (depuis le 1er juillet 2022), est habilité à procéder à l’exécution forcée d’un jugement.

• Ce dernier peut faire mettre en place une saisie attribution, qui permet de récupérer les sommes disponibles sur le compte bancaire de la personne condamnée (articles L.211-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution).

Il faut toutefois garder en tête que certaines sommes sont insaisissables et qu’un montant minimum doit toujours rester sur le compte bancaire du débiteur (montant égal au RSA, soit 598,54 € depuis le 1er juillet 2022).

• Une saisie-vente peut également être organisée. Elle consiste en la vente d’un bien appartenant au débiteur afin de transmettre au créancier les sommes issues de celle-ci (articles L.221-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution).

Tout comme la saisie attribution, certains biens ne sont pas saisissables à savoir ceux qui sont indispensables à la vie quotidienne et familiale ainsi qu’à l’activité professionnelle du débiteur.

• Enfin, une saisie sur rémunération peut être envisagée pour permettre une saisine directement sur les salaires du débiteur lorsque celui-ci est salarié.

Cette saisine peut s’effectuer sur les sommes dues à titre de rémunération à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs, quels que soient le montant et la nature de sa rémunération, la forme et la nature de son contrat (article L.3252-1 du Code du travail).

Pour ce faire, il convient de saisir le Juge de l’exécution par requête.

À l’issue de la tenue d’une audience de conciliation, si aucun accord n’a été trouvée entre le créancier et le débiteur, un acte de saisie peut être délivré à l’employeur du débiteur (copie de cet acte est également adressé à ce dernier).

L’employeur a ensuite l’obligation d’informer le Greffe du Tribunal de la situation de son employé (forme du contrat de travail, éventuelles saisies déjà en cours) et de lui verser la somme saisissable qui sera ensuite remise au créancier.

Les mesures d’exécution forcées mises en place par le Commissaire de justice sont également soumises au contrôle du Juge de l’exécution et le délai pour faire exécuter un jugement civil est de 10 années, conformément à l’article L.111-4 du Code des procédures civiles d’exécution.

Il est à noter que, dans le cas de l’exécution d’une décision judiciaire ou d’un acte juridique, les fonds versés par le débiteur au bénéficiaire transitent nécessairement par la CARPA.

La CARPA, ou Caisse des règlements pécuniaires des avocats, est l’organisme intra-professionnel qui est chargé de contrôler, sécuriser et valider les opérations de maniement de fonds.

• Que faire lorsque l’on se trouve face à un débiteur insolvable ?

Lorsque des dommages-intérêts ont été octroyés à une victime d’infraction pénale et que cette dernière rencontre des difficultés pour recouvrer les sommes dont elle est créancière, elle a la possibilité de saisir différents organismes (Fonds de garanties : CIVI ou SARVI par exemple*, ou directement l’assureur du débiteur).

Ces organismes se chargeront alors de lui verser les sommes auxquelles elle a droit afin de palier à l’insolvabilité du débiteur.

Ils bénéficieront par la suite d’une action récursoire afin de se retourner contre l’auteur de l’infraction et obtenir remboursement desdites sommes.

*Pour plus d’informations, vous pouvez consulter notre article : https://www.village-justice.com/articles/civi-sarvi-qui-saisir,42135.html

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