Le déroulé d’une audience de Cour d’assises

Le déroulé d’une audience de Cour d’assises

« Sous réserve de l’exigence de motivation de la décision, la loi ne demande pas compte à chacun des juges et jurés composant la cour d’assises des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve ; elle leur prescrit de s’interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l’accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : ” Avez-vous une intime conviction ? “. » (article 353 du Code de procédure pénale).

La Cour d’assises est la juridiction compétente pour juger des crimes, c’est-à-dire des infractions estimées par le législateur comme étant les plus graves qui puissent être commises.

Leur particulière gravité induit que des peines plus lourdes soient encourues, en comparaison avec celles encourues par un prévenu devant le Tribunal correctionnel, compétent pour sa part pour juger des délits.

Dès lors, et au vu des enjeux considérables d’une telle procédure, l’accusé est obligatoirement assisté d’un avocat.

Si l’accompagnement des victimes par un avocat n’est pas obligatoire, celui-ci reste fortement recommandé afin que la double dimension que comporte l’action des parties civiles devant cette juridiction soit pleinement respectée à savoir :

– Une dimension tout d’abord pénale puisque l’action des parties civiles est de « corroborer l’action publique » afin de faire établir l’existence de l’infraction et par voie de conséquence, l’existence de leurs statuts de victimes ;

– Et une dimension civile, l’objectif étant d’obtenir l’indemnisation des préjudices matériels, corporels et/ou moraux causés par l’infraction.

En tout état de cause, la procédure devant la Cour d’assises étant particulièrement complexe, il apparaît indispensable de se faire assister afin de pouvoir l’anticiper au mieux.

➢ Qui siège à la Cour d’assises ?

La Cour d’assises se compose de trois juges professionnels et de jurés au nombre de six en première instance, et de neuf lorsqu’elle statue en appel (article 296 du Code de procédure pénale).

Sont également tirés au sort, un ou plusieurs jurés supplémentaires qui assistent aux débats sans pouvoir manifester leurs opinions et ce, afin de palier à d’éventuelles difficultés qui pourraient amener un juré « principal » à quitter ses fonctions avant la fin de l’audience.

Les jurés sont des citoyens tirés au sort sur les listes électorales, qui doivent être âgés de plus de 23 ans, savoir lire et écrire en français et qui jouissent « des droits politiques, civils et de famille » (article 256 du Code de procédure pénale).

Certaines personnes ne peuvent cependant pas être jurés.

C’est le cas, par exemple, des personnes dont le bulletin n° 1 du casier judiciaire mentionnerait une condamnation pour crime ou pour délit, des majeurs placés sous tutelle ou sous curatelle, ou encore des fonctionnaires et agents de l’Etat révoqués de leurs fonctions.

En outre, les personnes âgées de plus de 70 ans ou les personnes n’ayant pas leur résidence dans le département siège de la Cour d’assises peuvent être légalement dispensés sur demande (article 258).

Pour les autres, seule la démonstration d’un motif grave peut leur permettre de se soustraire à leurs obligations sous risque d’être condamné à une amende de 3.750 euros conformément à l’article 288 du Code de procédure pénale.

À l’issue du tirage au sort, le Président de la Cour fait prêter serment à chacun des jurés.

➢ Les parties ont-elles la possibilité de récuser certains jurés ?

L’accusé ou son avocat, ainsi que l’Avocat général (représentant du Ministère Public), ont la possibilité, en amont des débats et au moment de la composition de la Cour, de récuser certains jurés sans expliquer les motifs de cette décision.

Le Ministère public peut ainsi récuser trois jurés en première instance et quatre jurés lorsque la Cour statue en appel.

L’accusé quant à lui dispose d’un droit de récusation pour quatre jurés en première instance, et pour cinq jurés en appel (article 298).

Il ne s’agit évidemment que d’un droit si bien qu’il est possible qu’aucun juré ne soit récusé lors du tirage au sort.

➢ Les audiences de Cour d’assises sont-elles publiques ?

Par principe, les débats devant la Cour sont publics
, sauf :

– Si leurs publicités sont dangereuses pour l’ordre ou les mœurs ;
– Si la partie civile le demande, pour des dossiers sensibles comme : les viols, les tortures et actes de barbarie accompagnés d’agressions sexuelles, la traite des êtres humains ou le proxénétisme aggravé ;
– Si la partie civile ne s’oppose pas une demande huis clos.

En tout état de cause, le Président a toujours la possibilité d’interdire l’accès à la salle d’audience aux mineurs ou à certains d’entre eux (article 306 du Code de procédure pénale).

➢ Comment se déroule l’audience de Cour d’assises ?

Le Président de la Cour a la police de l’audience et la direction des débats, conformément à l’article 309 du Code de procédure pénale.

En ce sens, il est investi d’un pouvoir discrétionnaire « en vertu duquel il peut, en son honneur et en sa conscience, prendre toutes mesures qu’il croit utiles pour découvrir la vérité » (article 310 du Code de procédure pénale).

Il a par ailleurs le devoir de ne pas manifester son opinion sur la culpabilité.

1. Le Président fait, en premier lieu, un rappel synthétique des faits et de la procédure.

2. À l’issue, les témoins, les experts l’accusé et les parties civiles seront entendus puis interrogés par la Cour, mais également par l’Avocat général ainsi que par les avocats des parties.

Chacun est appelé à être entendu au fur et à mesure de l’ordre établi le plus souvent au moment de la tenue de la réunion préparatoire de l’audience.

Les témoins quant à eux, ne peuvent assister aux débats tant qu’ils n’ont pas déposés.

A cet égard, ils prêtent également serment de : « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » (article 331 du Code de procédure pénale).

Cette obligation de serment ne s’applique cependant pas :

– Aux ascendants, descendants, frères, sœurs, alliés au même degré, ou au conjoint ou ex-conjoint de l’accusé ;
– À la partie civile ;
– Aux enfants âgés de moins de 16 ans ;
– Aux personnes qui ont été accusées, prévenues ou condamnées soit pour le crime dont est saisie la cour d’assises en qualité de coauteur ou de complice, soit pour un crime ou un délit connexe ou formant un ensemble indivisible avec le crime dont est saisie la cour d’assises (article 335 du Code de procédure pénale).

3. Une fois les débats terminés, la partie civile ou son avocat est entendu pour sa plaidoirie.

4. Le Ministère prend par la suite ses réquisitions, c’est-à-dire sollicite une peine à l’encontre de l’accusé.

5. Pour finir, l’accusé et son avocat présentent leur défense.

Conformément à l’article 346 du Code de procédure pénale, la réplique est permise à la partie civile et au Ministère public, mais l’accusé ou son avocat doivent impérativement avoir la parole en dernier.

➢ Comment se déroule la phase du délibéré ?

Avant que la Cour d’assises ne se retire pour délibérer, le Président donne lecture de l’instruction selon laquelle chacun doit répondre à l’interrogation suivante : « avez-vous une intime conviction ? ».

Chaque membre de la Cour devra ensuite voter, par bulletin secret, sur l’établissement ou non de la culpabilité de l’accusé.

Pour emporter condamnation de l’accusé, la majorité de sept voix au moins devra être établie lorsque la Cour statue en premier ressort.

Une majorité de huit voix au moins est attendue en cas de procédure d’appel (article 359 du Code de procédure pénale).

Si la majorité n’est pas atteinte, la Cour déclare l’accusé non coupable.

En cas de réponse affirmative sur la culpabilité, la Cour d’assises délibère sur la peine qui doit être prononcée (article 362 du Code de procédure pénale), puis le Président ou l’un des magistrats assesseurs rédige la motivation de l’arrêt c’est-à-dire les principaux éléments à charge contre l’accusé ainsi que ceux ayant permis la fixation du quantum de la peine.

La décision est ensuite rendue en audience publique et l’accusé en a connaissance.

➢ Les différences avec la Cour criminelle

Si la Cour d’assises a été créée sous la Révolution française, en 1791, de nombreuses modifications la concernant ont été effectuées depuis.

À titre d’exemple, et depuis le 1er janvier 2023, les « Cours criminelles départementales » ont été généralisées à tous les départements de France.

« En essai » depuis plusieurs années dans certains départements, ces Cours criminelles se différencient principalement des Cours d’assises par l’absence de jurés populaires.

En effet, ces Cours sont composées d’un Président et de quatre assesseurs, soit cinq magistrats professionnels (article 380-17 du Code de procédure pénale).

Elles jugent principalement personnes majeures accusées d’un crime puni de quinze ans ou de vingt ans de réclusion criminelle, lorsqu’il n’est pas commis en état de récidive légale.

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